La folie ou la raison ? L’amour incertain ou l’amour platonique ? A la question universelle des relations amoureuses, le talentueux James Gray apporte son grain de sel. Après avoir illuminé nos cinémas en octobre dernier, le voici qui débarque en DVD. Le film s’ouvre sur Leonard (Joaquim Phoenix), démarche chancelante sur un pont, éclairé par la lumière intime d’un New York nocturne, qui semble errer sans but dans la ville. A la simple vue de ce plan, on comprend que James Gray n’a pas abandonné son thème de prédilection : la noirceur. Mais là où La nuit nous appartient parlait mafia, ici point de gros flingues ni de corruption.
Le réalisateur est un homme réfléchi, cultivé et talentueux. Il a donc fait confiance pour la 3ème fois à Joaquim Phoenix qu’il considère comme « un frère ». Le plus incroyable dans sa performance d’acteur, ce sont surement ces petits gestes, ces petits regards qui subliment toute la tension qui est palpable. Phoenix semble si naturel qu’on comprend qu’il a assimilé toute l’essence humaine en lui. Face à lui, deux princesses très différentes. D’un côté Vinessa Shaw (Eyes Wide Shut), dans le rôle si complexe de Sandra, de l’autre Gwyneth Paltrow en sulfureuse amour volage. Si l’une doit sa performance à cette façon d’irradier l’écran en restant discrète, se faisant complément antagoniste d’un Leonard paumé, la seconde plus dévergondée joue un trouble faite plaisant. La rencontre des deux tourtereaux jette une dose de romantisme dans une vie trop réglée par des parents envahissants. Une scène d’amour sur un toit (brûlant) filmé comme un meurtre, un homme déchiré sentimentalement, une réalisation proche du thriller, pas de doute ce Two Lovers a une saveur spéciale.
Un autre Joaquim rend ce film encore plus beau : Joaquim Baca-Asay. Le directeur de la photographie est un habitué des plateaux de James Gray. Il plonge le spectateur dans la même obscurité d’une nuit blanche qu’il le faisait avec La nuit nous appartient. Two lovers est un film lyrique, sorte de mixe de Shakespeare et de chansons de Neil Young. Une œuvre tout en oxymore, servi par un trio (et même plus avec les rôles secondaires) bouleversant. Rarement une histoire amoureuse nous aura tenus en haleine près de 2heures non-stop. Tout simplement parce qu’il s’agit de bien plus que de l’amour, il s’agit de toute une vie qui se dessine sous nos yeux.
Two Lovers, de James Gray, avec Joaquim Phoenix, Vinessa Shaw, Gwyneth Paltrow (USA, 1h50, 2008)
La bande-annonce de Two Lovers ci-dessous :