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21 janvier 2010 4 21 /01 /janvier /2010 00:05

affiche-gainsbourg-film.jpeg

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Le tant attendu faux-biopic de l'homme à tête de chou régale de bout en bout. Joann Sfar réalise un conte singulier, en rien insultant et fait renaitre en nos cœurs cette idole de la culture française.


Avant de se lancer dans une argumentation concernant une légende, il convient de préciser à quel point l'auteur aime ou non ledit personnage. Pour ma part, Serge Gainsbourg est une icône adorée, mais je ne fais en rien partie de fans absolus connaissant tout de sa carrière et de sa vie (quoi que). Tout comme il convient de positionner le long-métrage de Joann Sfar face au réel. Il l'a dit et redit, Gainsbourg (vie héroïque) se rapproche du conte, et pas du biopic traditionnel. C'est dans le mensonge et la légende que se construit un tel personnage. Ici, pas d'anecdotes éclairantes sur la vie du chanteur, encore moins une chronologie détaillée de ses caps artistiques. Pas de billets brulés, pas de tubes incessants tournant à pleins régimes, on navigue entre le cliché choisi et la suggestion.


article-gainsbourg-2.jpgJoann Sfar prend des chemins plus ambitieux que la Môme, et c'est tant mieux ! En se taisant sur les épisodes qui l'intéresse moins, le cinéaste évite le biopic larmoyant, linéaire et parfois chiant. Son Gainsbourg est celui de ses souvenirs, de son enfance, de la légende plus ou moins véridique. A ce titre, le film se concentre sur un double aspect de la vie de l'homme à tête de chou : sa judéité et son passé de peintre. Le premier aspect apparait de loin comme le plus passionnant. De l'enfant stigmatisé comme juif sous l'occupation à son affirmation d'homme « mi-légume mi-mec », Sfarr retrace à sa façon une histoire d'amour entre Serge et la France. Il va jusqu'à puiser l'essence même de la reprise reggae de la Marseillaise. A un moment où certains nous bassinent constamment avec l'identité nationale, en voilà une belle réponse.


Bonjour créatures


article-gainsbourg-3.jpgCette forme de récit permet une construction faussement simple. Par saynettes se dévoilent tout l'art de construction supposé d'un grand homme. Sfar pose intelligemment son œil dans des environnements travaillés. La caméra prend le temps de poser son regard sur le monde qui se forme. A la manière des grands clippeurs (Glazer, Gondry, Jonze), on se retrouve devant des univers presque fantasmés. Les clubs, les chambres, tout semble construit si théâtralement que, paradoxalement, ils semblent en parfaite adéquation avec le personnage. On devine l'univers déjà présent dans les bandes-dessinées Le chat du rabbin ou le Petit vampire. En cela, il personnifie le double Gainsbarre à travers « la gueule ». Cette marionnette remplace non seulement la voix off mais sert de point de repère quant au degré de folie du génie. Plus encore, sa présence traduit ses pensées les plus perverses, les plus inavouables. Le rôle dans la scène offre un jeu subtil dans la complémentarité Gainsbourg/ Gainsbarre.


Autres créatures capitales dans le vie du parolier : les femmes. C'est autour de ses conquêtes que le film se structure. Bardot, Birkin mais aussi Greco et Bambou font irruptions plus ou moins durablement dans cette histoire. A ce titre, Gainsbourg (vie héroïque) nous gratifie de scènes merveilleusement belles. La construction de la Javanaise avec Juliette Greco fait preuve d'une douceur et d'un érotisme incroyable. Laeticia Casta incarne B.B dans ce qu'elle a de plus magnétique et de plus exaspérant. Mais c'est bien évidemment Jane Birkin qui transforme le plus l'homme. On assiste alors à la manière dont elle a un peu façonnée le mythe Gainsbourg.

article gainsbourg 4

Sur son nuage exactement


article gainsbourg filmOn pourrait s'attarder sur toute une série de seconds rôles plus ou moins bons (de Philippe Katerine décevant en Boris Vian à l'apparition de Claude Chabrol, très drôle en producteur) mais il convient de parler de la performance d'Eric Elmosnino. Cet acteur de théâtre va bien plus loin que le mimétisme. Il s'imprègne du personnage pour en faire une version partielle. Il n'a pas la prétention de l'incarner dans sa totalité. Sa ressemblance forte crée la distance nécessaire. Cet effet est d'autant appuyé que les acteurs chantent les morceaux (à la Walk The line), et évitent ainsi un côté karaoké des plus irritant. A une ou deux exceptions près, les présences de musiques sont réinterprétés, voire modernisées. Mieux, Sfar ne fait pas l'éventail des tubes du compositeur osant même quelques titres moins populaires.


article-gainsbourg-5.jpgC'est cet ensemble qui crée un sentiment très fort. A forte portée comique, Gainsbourg (vie héroïque) crée pourtant une nostalgie terrifiante. Comme si on regrettait encore plus fort celui qui a changé la culture musicale française le plus profondément depuis son homologue belges Brel. Sa carrure alliée à son amour si particulier de la France en font une légende encore plus indestructible qu'avant. Chacun aurait presque envie de raconter son Serge Gainsbourg. Une tristesse se dessine même au générique (au sens propre comme figuré) quand Sfar dédie cette œuvre à Lucy Gordon. Elle qui incarne si bien Birkin, fondatrice d'une partie du mythe, la voilà disparue tragiquement. Eh Lucy, si dans ton ciel plein de diamants tu croises Serge, dis lui qu'on parle de lui, il va s'en rouler un pour fêter ça !

 


Gainsbourg (vie héroïque), de Joann Sfar, avec Eric Elmosnino, Lucy Gordon, Laeticia Casta ( Fra., 2h10, 2010)

 

La bande-annonce de Gainsbourg (vie héroïque) ci-dessous :

 

 

 

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commentaires

E
<br /> Tout simplement émouvant, j'ai aimé la mise en scéne du réalisateur. Cela change!<br /> <br /> <br />
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A
<br /> nous ne sommes pas si nombreux à avoir été complétement envouté par le film. La plupart lui trouve des défauts. perso, pas franchement, j'ai aussi adoré. Et quelle audace !<br /> <br /> <br />
F
<br /> Je n'ai pas été si convaincue que toi par ce film, même si c'est loin d'être un navet. Mais j'étais déjà une déçue de Johann Sfar ... Et il y a des à priori qu'il est difficile de dépasser !<br /> <br /> <br />
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A
<br /> qu'est ce qui t'a déçu chez Sfar? Et dans le film? Je suis curieux de savoir tout ça !<br /> <br /> <br />
J
<br /> Je suis sorti dans le même état que toi Alexandre, et finalement après coup je me montre un peu déçu.<br /> Sans doute suis-je un peu plus fan que toi (sans prétention, ne le prends pas mal), et finalement j'ai reporté mes propres visions de Gainsbourg, ça n'enlève rien à la qualité du film. C'est la fin<br /> qui m'a déçu, une suite de tableaux brefs sans plus d'explication. Une reprise de ses meilleurs moments présents sur You Tube.<br /> Par contre pour le reste, je n'ai que du positif, même si je regrette l'absence d'une seule femme : Catherine Deneuve. Tu vas répondre qu'on allait pas faire un bordel ambulant. Mais Deneuve aurait<br /> servi de transition avec les années 80, c'est le moment de "Dieu est un fumeur de Havanes", et le moment où il écrit un album pour elle.<br /> Enfin parler de son amour pour la peinture, de la destruction de ses oeuvres était un élément essentiel, le réalisateur ne l'a pas omis d'ailleurs.<br /> <br /> <br />
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A
<br /> je n'ai aucune deception. C'est un Gainsbourg qui est exposé. Pas le tien, ni le mien. Donc Deneuve, il l'a zappé (je crois qu'il a failli mais que c'était compliqué avec la principale<br /> interressée). Je ne trouve pas la fin comme un best of de You tube, il n'y a pas les clichés habituel (le billet brulé, les passages tv etc). il adoucit le Gainsbarre, il se concentre sur cet<br /> enfant insatisfait. Et quand il reprned le passage de la Marseillaise, il laisse, lui, le poing levé qui se transforme en "poing d'honneur". Il montre cette communion de Sergio avec la France<br /> malgré ses frictions. Et puis, à la fin, il s'arret quant il faut. Quand l'homme est en paix (ce qui correspond assez à la réalité, semble t-il) et que son passé d'enfant est transmi à son gamin.<br /> Et on évite la décadence voyeuriste de la fin. Rien que cette retenue, c'est génial !<br /> <br /> <br />
A
<br /> Vu et approuvé! J'ai adoré le parti pris de Sfar et l'intelligence avec laquelle il a construit son film. En revanche, c'est assez marrant, mais j'ai aimé les seconds rôles que tu n'as pas<br /> appréciés (Katerine), et j'ai moyennement apprécié ceux que tu portes aux nues (Gordon et Casta notamment).<br /> Mais on est bien d'accord sur le fait que Joann Sfar a fait là une oeuvre bouleversante, un brin longue, mais d'une originalité folle!<br /> <br /> <br />
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A
<br /> génial si tu as aimé. J'ai l'impression de défendre ce film corps et ame. Pour les seconds rôles, c'est juste que je suis fan de Vian. Katerine ne joue pas mal mais pour le cup la distance physique<br /> entre les deux, et dans la voix, m'a fait bizarre.<br /> Quant à Gordon, elle a ce brin de folie de Birkin en étant différente. Et puis je la trouvait tellement belle. Casta, elle arrive à transmettre ce que j'aime et ce que je déteste chez Bardot. et<br /> son rôle est mis en valeur par sa complémentarité avec Gainsbourg.<br /> et je n'ai aps trouvé ça long, mais presque trop court, c'est dire !!! <br /> <br /> <br />
N
<br /> Tu me donne envie de me laisser embarquée...vais essayer de le voir :)<br /> <br /> <br />
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A
<br /> oui tente le, t'as pas grand chose à perdre à mon avis. Oh pire,  ce te donnera juste envie de réécouter les albums de l'homme à tête de choux.<br /> <br /> <br />

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