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9 novembre 2010 2 09 /11 /novembre /2010 20:42

Le dernier du mauvais camp ?

 

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Par une incroyable splendeur esthétique et un traitement subtil, cette histoire d'explorateur devenu chaman offre à voir une Amérique pré-coloniale avec un regard unique d'ethnologue du cinéma. Grandiose.

 

Difficile de dire ce qu'il y a de plus beau : le film en lui même ou le fait que EdDistribution arrive à sortir cette œuvre, vingt ans après son tournage ? Une chose est sure, l'arrivée en salle française de Cabeza de Vaca est un petit miracle, que l'on se doit de saluer. Le premier long-métrage de fiction du mexicain Nicolas Echevarria (il avait jusque là sévit dans le documentaire) est une expérience incroyable qui renvoie aux travaux de Jodorowky ou de Werner Herzog. La montagne sacrée et Aguirre ou la colère de dieu en mètre étalon ne font pas pâlir Echevarria. Il raconte, de manière plus ou moins romancée, la vie de l'explorateur Alvar Nuñez Cabaza de Vaca.

 

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De conquistador pour la couronne de Charles Quint, il se retrouve chaman indien. Une trajectoire incroyable dont s'empare le film pour cet être inconnu en France. Le film commence sur un radeau, un peu tel le tableau de Théodore Géricaud, dont l'équipage décimé parvient tout juste à accoster. Au cours d'une attaque d'indiens, l'explorateur est fait prisonnier et recueilli par sorcier. D'esclave, l'espagnol devient apprenti. D'apprenti, il en sortira faiseur de miracle. Ce n'est rien dévoiler de capital que de résumer une bonne partie du film qui ne mise pas tant sur la trajectoire que sur son traitement. On navigue dans un pur trip à l'intelligence remarquable. En premier lieu car il interroge sur la place des conquistadores.

 

cabeza de vaca plus 1

Cabeza de Vaca filme des rapports humains bien plus poignants qu'il n'y paraît. Un peu à la manière d'un Dead Man (sorti après), le film mexicain montre que la communication peut exister en dépit de la barrière culturelle. On pourrait parler de film anthropologique. Un peu à la manière d'un Levy-Strauss, le film démontre subtilement l'art de comprendre l'autre, sans se renier, mais sans dénaturer la culture en face. Les rites chamaniques paraissent dans un premier temps étranges, non palpables. Le spectateur est dans la même errance que le héros. Et puis, dans une exaltation de souffrance intérieure, la folie apparaît changée. Qui devient le plus mystique ? Le prétendu sauvage ou l'européen chrétien ? Cabeza de Vacas interroge évidemment sur la soumission des peuples autochtones aux dictas du vieux continent mais pas par son personnage principal.

 

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Un cinéma d'ethnologue

 

Fasciné par la magie et les rites ancestraux, Nicolas Echevarria rentre dans les trips et les choix du chaman occidental. Impossible de considérer cette réalisation comme une autre. La beauté formelle d'abord illustre cette admiration pour les peuplades d'antan, décimées depuis. Une véritable émotion subtile s'y installe où le sensitif ne trahi jamais la pensée. La nature y est aussi belle que chez Malick. En cela le rapport à l'environnement pour l'Homme de l'Ouest servirait presque de préquel au Nouveau Monde. Au détour d'une procession, on découvre même des femmes indiennes peintes en bleue non sans rappeler Avatar (Cameron ne s'est jamais caché de ce type d'influences pour les Na'vi). L'envoutement est total.

 

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Les gens peu ouvert d'esprit n'aimeront pas Cabeza de Vacas (ce qui n'est en rien réciproque, on peut détester le film sans être taxé de fermé d'esprit). La lenteur extrême de son déroulement, entre autres, aura de quoi rebuter. C'est pourtant ce qui fait tout son charme. La musique dont la contrebasse entêtante vient assoir une ambiance incroyable aide à cela. Le langage, plus ou moins compréhensible, et les étapes de dialogues possibles- par les mots comme par les gestes- entres ces êtres si proches et si lointain se fait en douceur. L'explorateur apprend peu à peu les rites pendant qu'un indien surprend en disant distinctement en espagnol « mes mains ». Une harmonie rêvée et regrettée par le cinéaste qui prend fin avec l'arrivée d'autres colons espagnols. Et par un plan final somptueux, de clore cet horrible retournement de situation que l'Histoire nous a appris. D'une possible harmonie et compréhension des peuples a abouti l'inhalation culturelle et physique (par les microbes et les guerres) des tribus indiennes du Nouveau Monde. Cabeza de Vaca, foncièrement humaniste, est amère mais resplendi complétement par sa splendeur plastique et son audace narrative. Un véritable chef-d'œuvre digne de Jodorowsky!

 

Cabeza de Vaca, de Nicolas Echevarria, avec Juan Diego, Daniel Gimenez Cacho, Roberto Sosa (Mex., 1h42, 1991, sortie française en 2010)


Sortie le 22 décembre

 

La bande-annonce de Cabeza de Vaca :

 

 

 


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