La mécanique s’enraille
Ces farces inconséquentes, plus ou moins tragiques, laissent un arrière goût d'inachevé et un ennui profond causé par le manque de dynamisme.
Des légendes urbaines roumaines, Cristian Mungiu et quatre confrères en tirent des courts-métrages reliés entres eux. Ils les appellent Les contes de l'âge d'or. Sorte de manifeste du parti anti-communiste, ils tendent à souligner l’absurdité tragi-comique de la société qui a été fondée. Le point de cristallisation s'appelle Ceausescu, despote omniscient aux tentacules envahissantes. Dans le plus drôle des courts-métrages, les zélés du pouvoir cherchent à modifier les photos officielles pour mettre en valeur le « génie des Carpates ». Aux côtés de Giscard d'Estaing, il doit apparaître comme souverain d'un bloc anti-capitaliste. Mais comme toutes les farces trop lourdes, l'absurdité accouche d'une souris. L'incident aussi cocasse que terrible pour ceux qui vont le subir s'achève là. On passe au suivant.
C'est bien le principal soucis de ces Contes de l'age d'or. Ils ne sortent jamais de l'anecdotique. Chaque portion illustre un pan du non-sens du régime. Chaque fois, quand la comédie ou le tragique est enfin en place, l'histoire s'arrête là, sur un écran explicatif « la légende dit que ». Rien à voir avec les morales finement pensées des contes de l'enfance. Non, c'est juste un élément qui ressort. Ici une illustration des petits trafics de bouteilles vides, là un passage de convoi officiel qui tourne -sûrement- à la catastrophe.
Entre temps : l'ennui. Ces histoires naviguent entre du mauvais Kusturica (déjà que le bonhomme est loin d'être un modèle), où la campagne isolée mais pleine de vie se frotte à un appareil central déconnecté, et chronique sociale peu inspirée. Le meilleur, c'est encore ce couple de voleur de bouteilles. S'il lui manque un peu d'ampleur pour devenir fort, l'histoire de Crina et Bughi illustre bien cette envie de transgression ainsi que la chasse aux interdits mineurs. Le simple fait de mentir leur provoque une excitation presque sexuelle. Le pire se trouve avec cette histoire de cochon à tuer sans bruit dont on ne retiendra encore que le final dérisoire. Mungiu en chef d'orchestre tente une progression dans le dramatique. Le tout dernier plan du film -plein de sens – laisse entrapercevoir toute la force sociale et drôle qui aurait pu se dégager de ces histoires qui, pour le coup, aident bien à s'endormir.
Les contes de l'âge d'or, de Cristian Mingiu, Ioana Uricaru, Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu et Constantin Popescu avec Diana Cavaliotti, Radu Iacoban, Tania Popa (Rou., 2h23, 2009)
Disponible en coffret dvd édité chez Why Not Productions et France Inter avec 4 mois, 3 semaines, 2 jours
La bande-annonce de Les Contes de l'âge d'or :